Baloji nous parle sa vision de la mode masculine en marge du défilé Louis Vuitton
Alors qu'il assistait au défilé Louis Vuitton hommes printemp-été 2025 par Pharrell, Baloji s'est entretenu avec L'OFFICIEL Belgique. L'occasion pour l'artiste de partager sa vision de la mode masculine.
Comment définis-tu le style masculin ?
C'est une question sérieuse. Je trouve que le style masculin est très genré et conformiste. Ce qui est intéressant, c'est quand la mode masculine sort des sentiers battus. C'est compliqué, ça prend du temps, et même en 2024, certaines choses restent difficiles à faire accepter. Qu'un homme porte une robe, c'est compliqué. Qu'un homme porte un un chapeau de forme féminine, c'est compliqué.
Où te situes-tu sur ces sujets-là ?
Pour ma part, je fais partie de la tribu des "iels", je fais ce que j'aime. C'est le meilleur moyen de réinventer une mode masculine intéressante. C'est pour cela que c'est fabuleux d'avoir quelqu'un comme Pharrell chez une grande maison, car il apporte des codes du streetwear, de l'élégance japonaise, et même des références aux Black Cowboys dans sa collection précédente. L'histoire a souvent oublié les Black Cowboys et il est important de les mettre en lumière, tout comme les tribus amérindiennes et leur héritage. En fait, le vêtement le plus porté par exemple était une robe ou une tunique. Bousculer ces codes est une bonne chose. Et les accessoires prennent aujourd'hui une place importante chez LV. L'accessoire est devenu un élément essentiel.
Quels sont tes essentiels ?
Je pense qu'un homme ne devrait pas hésiter à porter un sac. Il ne devrait pas se demander comment il va être perçu avec un petit sac à main ou une petite pochette LV. C'est encore compliqué pour certains hommes de se dire qu'ils peuvent porter cela sans être jugés.
Tu as des origines congolaises, tu es né au Congo et tu as une histoire complexe qui t'a amené en Belgique. Comment vis-tu cet héritage belge et congolais et en quoi cela définit-il qui tu es ?
Je vais te répondre de manière un peu étrange. J'ai une fille qui se pose la question de son identité et qui veut se définir. Ma réponse est qu'elle est les deux, de manière équivalente. Elle n'est pas 50 % noire et 50 % blanche, mais 100 % de chaque. De la même manière, je suis entièrement de l'une et de l'autre culture. Nous demander de choisir nous restreint. Nous sommes multiples. Mais on essaie de tout cloisonner, de n'être qu'une seule chose à la fois. Lorsque nous nous affranchissons de ces cases, le monde nous appartient.
Tu es un artiste, tu fais du cinéma, tu chantes. Quels sont tes projets pour l'avenir ?
Je fais plusieurs choses, mais je suis un très mauvais ambassadeur pour mon travail. C'est une catastrophe. Je travaille beaucoup comme directeur artistique et costumier pour des films et différents projets, mais mon travail principal aujourd'hui est d'être réalisateur. J'ai deux longs métrages en préparation, ainsi que des projets d'expositions, d'installations vidéo, de créations de vêtements, de costumes et d'œuvres visuelles. Nous sommes bien occupés !
Qu'est-ce que Louis Vuitton représente pour toi ?
Je vais te donner une réponse peut-être étrange, mais j'assume totalement : c'est le damier. Comment ne pas le reconnaître ? Au-delà de cela, il faut se rappeler que lorsque quelque chose se passe dans le monde de la mode à Paris, le reste du monde est au courant. On oublie que, par exemple, les Congolais ont accès à l'information au même moment que les Parisiens. Lorsqu'une collection sort aujourd'hui à Paris, elle est vue en Inde, en Afrique du Sud, et partout ailleurs. Cela signifie que les goûts sont communs dans le monde entier. Les gens oublient souvent l'importance de la mode à un niveau global. On a l'impression que c'est un domaine réservé aux happy few parisiens, londoniens ou italiens, mais en réalité, c'est globalisé. Le goût est globalisé aussi, je crois.