Que penser du retour de "Killing Eve" ?

Comment juger une saison sur la foi de seulement deux épisodes proposés à la presse ? Disons en prenant la température de l’eau du bain, histoire de vérifier si elle est glacée ou brûlante. Comment, enfin, aborder le dénouement une série qui, sur sa précédente livraison, évoquait surtout l’invité-e pénible de fin de soirée, qui s’éternise chez vous, ouvre une nouvelle bouteille, raconte la même histoire drôle depuis son arrivée, et ne s’aperçoit pas de votre lassitude ? Et pourtant, sa première saison était remarquable, dans sa mise en scène du ballet entre une tueuse professionnelle, Villanelle (Jodie Comer, donc, exceptionnelle) et d’une employée du MI5, Eve (Sandra Oh, pas moins géniale), obsédées l’une par l’autre, sur fond d’intrigues agréablement conçues et de séductions troubles.

Astucieuse, fantaisiste, la série imaginée par Phoebe Waller-Bridge (déjà responsable de Fleabag) emballait, par son originalité, ses héroïnes détonnantes, son ton acide et sensuel. Il était cependant temps d’y mettre à terme, tant les saisons suivantes peinaient à retrouver ce souffle enthousiasmant. Les deux premiers épisodes semblent confirmer partiellement cette intuition : l’un patine, le suivant en revanche indique la possibilité d’ultimes frissons. L’on retrouve Villanelle en plein délire mystique lorgnant plus du côté des Monty Pythons que de Dreyer, avec une actrice en roue libre, et Eve, toujours habitée par le souvenir de sa Nemesis, entre attraction et répulsion. Le personnage d'Hélène, aux contours troubles, interprétée par Camille Cottin (qui jouait dans Mouche l’adaptation française de Fleabag…) semble prendre une part plus importante dans cette saison - ajouter une nouvelle donnée dans une mécanique hier bien huilée, aujourd’hui un peu rouillée, étant toujours une bonne idée, il n’est pas exclu qu’elle apporte un peu de fraîcheur, de surprise, à un univers devenu un rien monotone, au tranchant émoussé.