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Comment Essaouira est devenue la nouvelle destination branchée du Maroc ?

Spot prisé des hippies dans les années 70, cité baignée de spiritualité et habitée par les sportifs et créatifs du monde entier, Essaouira réinvente l’esprit hippie chic au point de devenir un lieu incontournable.
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Avec ses remparts à la Vauban, ses maisons blanches aux volets bleus et son petit air de Saint-Malo égarée en terre africaine... Essaouira s’est muée en spot de glisse aquatique, cité culturelle et escale hippie chic. Ici, le Taros souffle toute l’année, plus ou moins fort selon les saisons. Un vent marin qui fait d’elle l’un des lieux préférés des kitesurfeurs mais pas que... Car réduire cette “perle de l’Atlantique” à un pôle d’attraction sportif serait faire injure à l’une des plus belles villes fortifiées d’Afrique du Nord, construite en damier selon les principes de l’architecture militaire européenne, à la fin du XVIIIe siècle. À l’époque, le sultan alaouite Sidi Mohamed Ben Abdallah veut faire de cette ancienne cité portugaise située au bord de l’Atlantique un port royal pour contrôler le commerce maritime et développer les échanges commerciaux avec l’Europe. Aujourd’hui, Essaouira vit au rythme des ballets des bateaux de pêche qui ramènent chaque jour des cargaisons de poissons sous l’œil vigilant des goélands. Sardines, mais aussi saint-pierre, bars, rougets, homards, araignées... De quoi nourrir une table locale généreuse qui ne tourne pas pour autant le dos à la terre.

À quelques kilo- mètres de son centre névralgique, une campagne féconde livre d’autres richesses : l’huile d’argan, les fromages de chèvre artisanaux, les légumes bios, les citrons caviar et du vin de terroir ! Petit bout de terre protégé par un chapelet d’îles, la ville qui a bercé tant de voyageurs, d’écrivains, d’artistes dans les années 70 émerge de l’océan comme une des destinations les plus cools du moment.

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© Pierre De Greef

À FAIRE, À VOIR

Déjeuner les pieds dans le sable entre deux cours de surf, se laisser bercer par la musique berbère sur une terrasse design perchée au-dessus de l’océan et arpenter ses remparts sur lesquels les vagues viennent s’éclater, voilà le meilleur moyen de prendre le pouls d’Essaouira !

Sur les plages qui bordent la baie, les touristes et Marrakchis en vacances prennent un bain de soleil, font des selfies, observent le spectacle des chalutiers qui rentrent au port, avant de choisir le poisson qu’ils dégusteront en plein air sur de grandes tables ou autour d’un barbecue. Mais c’est sans nul doute dans le souk, situé au croisement des deux grands axes, de Bab Doukkala au port et de Bab Marrakech aux remparts, que bat véritablement le cœur de la ville.

C’est dans sa médina intimiste qu’il faut venir flâner, écouter, se poser, commander un thé à la menthe dans un ancien fondouk, observer les marchands négocier, sentir les montagnes d’herbes et d’épices destinées à sa cuisine colorée... Sans oublier de se laisser tenter par une corne de gazelle chez Driss, la plus ancienne pâtisserie de la cité.

Dans ses petites rues bondées d’étales, on discute, on compare, on s’interpelle. On ne compte plus le nombre de riads ou maisons d’hôtes rachetés et rénovés par des Français, des Anglais, des Italiens, ou par les descendants d’anciens habitants de Mogador, décidés à redonner vie à ces demeures d’antan. Du coup, les petits endroits stylés et européanisés sont légion, à l’image de Dar Baba, le restaurant de John Quinn (le décorateur en vogue d’Essaouira) qui mixe objets rétros, couleurs vives et esprit hippie chic. À la carte, on déguste ici tapas et plats d’inspiration méditerranéenne dans une ambiance mi-pop, mi-intimiste servie par une excellente bande-son. À deux pas de là, bienvenue dans l’univers déjanté d’un peintre fasciné par la couleur ! Love By Caravane est l’œuvre de Didier Spindler. Son mantra ? “Passeur de bonheur” et, par la même occasion, de petits plats gourmands à grignoter à l’ombre de salons vintage ou dans un joli patio ensoleillé. Chez Koulchi by Hamid Drissi, on fait le plein de vieilles affiches de cinéma, mais aussi de vaisselle, verres, plaids ou coussins avant de reprendre l’avenue vers le quartier de Kasbah Jdida. Au coin de la rue du Caire, la Galerie Damgaard expose les œuvres des “artistes singuliers d’Essaouira”, mouvement d’art brut né dans les années 80. Derrière, on découvre deux concept-stores sympas : Histoire de filles et L’Atelier Café-Boutique, entre jolie déco et vêtements made in Morocco.

À l’heure de l’apéro, on grimpe sur les terrasses du Taros avec vues sur la Sqala et l’océan. On s’y attarde pour dîner sous les étoiles ou bien on se love dans les canapés de La Table Madada qui offre une bonne cuisine de la mer sous les voûtes d’un ancien entrepôt de caroube. Avec ses grandes arches de pierres coiffant les tables, le cadre de cette belle adresse semble tout droit sorti de la Mogador d’Othello, le film culte d’Orson Welles tourné à Essaouira. Tout ça sans oublier, le Relais & Châteaux L’Heure Bleue qui vit encore à l’heure de l’âge d’or de l’ancienne Mogador, quand s’y inventait un art de vivre cosmopolite nourri des brassages de son grand port de commerce. En cuisine, le ras el-hanout (le traditionnel mélange d’épices marocain) aromatise le poisson du jour à la plancha, une pointe d’huile d’argan relève le médaillon de homard et une crème Chiboust à la vanille nappe une pastilla aux fruits. Suprême raffinement, on assortit les mets avec le vin maison “L’Heure Bleue de Val d’Argan” créé avec le domaine éponyme, un des seuls vignobles de la région.

Et pour terminer, petit détour indispensable au pied de la Scala del Mar où le restaurant Umia tire son épingle du jeu avec sa cuisine simple et raffinée et sa déco branchée. Brigitte, alias “Bibi”, expatriée française à la personnalité bien trempée, a ouvert ce restaurant de cuisine du monde et marocaine revisitée en 2013. Dans l’assiette, on savoure d’excellents produits locaux travaillés avec brio comme un risotto de blé berbère aux palourdes. À quelques mètres de là, on dévalise la boutique Minimal et ses trésors dénichés par Bibi (encore elle !). Vaisselle en céramique, tapis, linge de maison... Tout y est beau.

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© Pierre De Greef

LES JARDINS DES DOUARS

Découvrir Essaouira, c’est goûter à un Maroc berbère encore authentique, mais aussi (et peut-être surtout) séjourner chemin faisant au Jardin des Douars, un hôtel de charme indépendant, chargé d’histoire, qui ne joue pas l’escalade des prix mais soigne l’accueil de ses hôtes. L’histoire débute en 2005 quand Sébastien Lob, serial entrepreneur bruxellois, et son épouse découvrent la belle Essaouira et cette vaste demeure aux allures de Kasbah, posée sur une colline d’arganiers, à l’abri des grands vents... Le coup de foudre est immédiat ! Quelques mois plus tard, avec son associé et ami, Emmanuel Andries, ils acquièrent les terres et la bâtisse principale, y ajoutent des touches de décoration et de confort, et construisent des extensions. Authenticité, luxe et convivialité sont alors leurs mots d’ordre. Quelques années plus tard, Grégoire Aubron et sa femme Nanie rejoindront l’aventure, sacralisant cet esprit de famille dont seules les retraites singulières ont le secret. Aujourd’hui, ce Ksar oscille entre le boutique-hôtel ethnique et la maison familiale qui sent bon les vacances.

Un petit paradis qui se vit de deux manières : soit en réservant une chambre ou une suite classique au cœur de son Ksar d’hôtes, soit en optant pour une des six superbes villas familiales pouvant accueillir de 6 à 14 convives. En famille ou entre amis, ces maisons privatives ont le grand avantage d’offrir tout le confort et les services de l’hôtel, calme, intimité et indépendance en guise de bonus. Gouvernante aux petits soins, piscine chauffée, jardin privé, équipement pour bébés et enfants, service de baby-sitting, sans oublier les soins prodigués par les mains expertes d’Ibtissam et son équipe, les magiciennes du hammam... Tout y est pensé pour vivre heureux, loin, très loin, des tracas du quoti- dien.

Côté déco, chaque recoin du domaine est un clin d’œil à l’artisanat marocain et au savoir-faire architectural de Ouarzazate. Avec leur décor néo-tradi patiné par le temps, le restaurant, le spa et les différents bars qui bordent les deux piscines (l’une accessible aux enfants, l’autre pas) mêlent avec doigté tradition et modernité, tandis que les suites et villas proposent un style authentique et décontracté, entre ombre et lumière, atmosphère feutrée et ensoleillée. À table, Amina, secondée par toute sa brigade, travaille les produits locaux sans pour autant s’empêcher de twister les plats traditionnels comme le tajine ou encore le couscous. Une gastronomie à déguster au choix dans l’intimité de sa villa ou sur la jolie terrasse ombragée du restaurant. Et pour ceux qui aimerait découvrir les alentours, VTT, quad ou encore dromadaire peuvent être mis à la disposition des aventuriers. À moins de sauter dans l’une des navettes de l’hôtel pour une virée dans le souk et en prendre, une fois encore, plein la vue.

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